Un bâtiment ancien rénové est considéré comme un bâtiment neuf lorsqu’il a subi une modification radicale dans ses éléments essentiels, à savoir dans sa nature, sa structure et le cas échéant sa destination. Lorsque des travaux entrepris dans un bâtiment sont tels qu’ils entraînent une modification importante, il est parfois malaisé d’apprécier si le bien a subi une modification radicale dans ses éléments essentiels. La doctrine administrative admet néanmoins que l’on se trouve devant un bâtiment neuf si le coût des travaux atteint au moins 60% de la valeur vénale du bâtiment, hors terrain, au moment de l’achèvement de ces travaux.
La ville de Spa se base sur l’expertise d’un Notaire en ce qui concerne la valeur vénale du bâtiment pour en conclure qu’elle entre dans les conditions pour que le bâtiment historique qu’elle rénove et qui abrite la principale fontaine de la Ville soit considéré comme neuf. L’administration de la TVA n’est pas de cet avis. Elle rejette la valeur vénale établie par le Notaire en arguant qu’il n’est pas possible d’établir une comparaison avec d’autres biens eu égard au caractère historique hors norme du bâtiment. Elle préfère lui substituer la valeur de reconstruction à neuf fixée par la compagnie d’assurance afin de démontrer que la règle des 60% n’est pas atteinte.
Le tribunal rejette la position administrative. La valeur de reconstruction à neuf fixée par une compagnie d’assurance est sans lien avec la valeur vénale d’un immeuble. Il s’agit de deux valeurs tout à fait différentes, l’une représentant le montant nécessaire pour reconstruire intégralement le bâtiment, l’autre représentant le prix qu’un acheteur serait susceptible de proposer pour acquérir le bâtiment. C’est en outre de manière totalement péremptoire que l’administration affirme que le bâtiment est d’une nature tellement spécifique que le marché de pleine concurrence peut difficilement exister. Même si on peut imaginer que les amateurs seraient peu nombreux, rien ne permet de considérer que l’immeuble ne pourrait être commercialisé dans des conditions de pleine concurrence et ce, d’autant plus que la ville de Spa est très touristique. C’est donc à bon droit que la ville de Spa considère que le bâtiment est neuf dès lors que le coût des travaux se révèle être supérieur à 60% de la valeur vénale du bâtiment après travaux.
On peut regretter la circonstance que le tribunal ne se soit pas interrogé sur la valeur normative de critères provenant exclusivement d’instructions administratives pour déterminer lorsqu’un bâtiment reconstruit est à considérer comme neuf. La C.J.U.E avait pourtant dans son arrêt du 16/11/2017 (aff. C-308/16) précisé ce qu’il convenait de considérer comme un bâtiment neuf s’agissant d’un immeuble réhabilité : « le bâtiment concerné doit avoir subi des modifications substantielles destinées à en modifier l’usage ou à en changer considérablement les conditions d’occupation ». Nul besoin d’une discussion stérile sur la différence entre la valeur de construction et la valeur vénale.